Genre et développement

Introduction

, par AFPICL-BU HDL

La notion de genre

Le terme « genre » est traduit de l’anglais « Gender ». Egalement largement utilisé en espagnol (Genero), « genre » s’est imposé dans les milieux universitaires et associatifs francophones dans un souci de terminologie commune (Déclaration de la conférence des femmes de la Francophonie, Luxembourg, 2000, document pdf).

Femmes sur le quai de gare au Mali
Laurent Freyss

Le genre se réfère à la construction et à la répartition des rôles sociaux attribués à chaque sexe, dans une société et à une époque données. Ces rôles varient d’un pays à l’autre selon l’âge, la culture, la classe sociale, etc. Ils sont institutionnalisés, font partie intégrante des mentalités et des cultures et sont véhiculés par l’institution, la famille et l’éducation. Ils peuvent se modifier et évoluer sous l’influence de la technologie, de l’éducation, de guerres, de mesures politiques ou économiques et faire l’objet de normes juridiques (codes de la famille).
Le genre est un concept sociologique évolutif pour expliquer les différences entre femmes et hommes dans une société donnée.

Il ne faut pas confondre « genre » avec le mot « sexe » qui évoque les caractéristiques biologiques et physiologiques qui différencient les hommes et les femmes.

Le genre décrit des rôles socialement construits, assimilés et inculqués culturellement et concerne aussi bien les hommes que les femmes.
Ces constructions sociales sont source d’inégalités entre hommes et femmes, la plupart du temps au détriment de ces dernières. Même si les droits des femmes ont progressé, il existe des disparités de droits et de statuts entre les femmes et les hommes dans de nombreux pays. Les femmes ont moins accès à un travail et un salaire décents, à des responsabilités ou à des mandats politiques que les hommes. Elles sont particulièrement touchées par la pauvreté.
A noter que l’indice sexospécifique de développement humain (ISDH) mis en place par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) est composé des mêmes variables que l’indice de développement humain (IDH) et qu’il prend en compte en plus les inégalités entre femmes et hommes.

L’approche « Genre et développement »

Cette approche repose sur l’analyse et la remise en cause des processus qui différencient et hiérarchisent les individus en fonction de leur sexe. Elle compare la situation des femmes et des hommes grâce à des outils d’analyse qui permettent de diagnostiquer les relations de genre dans une société donnée sous plusieurs aspects : sociaux, économiques, culturels, environnementaux, politiques. Une fois les inégalités éventuelles identifiées, elles seront prises en compte dans des programmes ou des projets de développement. L’approche genre va ainsi contribuer à promouvoir l’égalité des droits et le partage équitable des ressources et des responsabilités entre femmes et hommes grâce à la prise en compte de leurs rôles et de leurs besoins.

Historique du genre associé au développement dans le monde…

Pendant la « Décennie des femmes » (1975-1985) l’approche « Femmes et développement » est apparu dans les projets de développement. Elle visait à réduire les inégalités en plaçant les femmes comme principales bénéficiaires (vision économiste) mais sans s’attaquer aux fondements des inégalités entre les hommes et les femmes (Par exemple : inutile de donner accès au crédit ou à la formation à des femmes qui n’ont ni accès à la terre, ni liberté de mouvement). Celles-ci étaient cantonnées dans leur rôle traditionnel (maternité, éducation des enfants, santé) sans effet sur les rôles socialement construits, d’où l’échec de cette approche.

L’approche « Genre et développement » a été adoptée à la Conférence de Pékin (1995). Elle consiste à prendre en compte la répartition des rôles et des activités des femmes et des hommes dans chaque contexte et dans chaque société pour tendre vers un équilibre des rapports de pouvoir entre les sexes.
Le programme d’action de Pékin contient 12 objectifs stratégiques concernant l’égalité de genre. Depuis 2000, les Objectifs du Millénaire sont le principal cadre de référence international en matière de développement, l’objectif 3 étant de « promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes ».

… et en France

C’est en 2000 que le HCCI (Haut Conseil de la Coopération Internationale) a mis en évidence dans une étude intitulée « L’intégration du genre dans la politique française de coopération, bilans et perspectives » le retard de la France par rapport aux autres pays européens sur la prise en compte des rapports sociaux entre femmes et hommes dans la politique mise en œuvre. Ce sont les secteurs de l’éducation et de la santé qui ont été privilégiés dans les programmes et les projets de développement soutenus par la Coopération française alors que les secteurs politiques et économiques n’ont pas reçu la même impulsion.

En 2004 le ministère des Affaires étrangères a lancé le Réseau Genre en Action pour faciliter l’information, la formation et les échanges sur le « genre et développement » grâce à ce portail d’informations et de ressources. D’autres actions ont été soutenues (recherche, formations universitaires, obligation de critères du genre dans les appels d’offre, etc.) pour favoriser l’intégration du genre dans la politique de coopération française.

Enjeux du genre dans les institutions internationales…

Les institutions internationales et les Organisations non gouvernementales ont fait le constat des conséquences néfastes sur le développement des inégalités entre femmes et hommes.

L’application de l’approche genre dans les projets de développement permet d’agir plus efficacement pour établir une égalité femmes-hommes. Le genre occupe désormais une place importante dans les institutions de développement aussi bien dans leur fonctionnement que dans les procédures d’action qu’elles mettent en place. C’est le cas entre autres des Nations Unies, de l’OCDE, de l’Union européenne.
Elles ont également créé de nombreux outils et guides méthodologiques et favorisé les travaux de recherche sur le genre. Si des efforts importants ont été faits par les gouvernements et les Nations-Unies depuis la quatrième Conférence mondiale sur les femmes (Beijing, 4-5 septembre 1995), force est de constater que subsistent encore de nombreuses inégalités fondées sur le genre.

... et dans les ONG

Sous l’impulsion de Coordination Sud (coordination d’ONG francaises de solidarité internationale), le genre s’impose peu à peu dans les ONG : mise en place de formations internes pour expliquer la notion de genre aux responsables d’ONG et aux militants, intégration de l’approche genre dans le fonctionnement interne des ONG, prise en compte du genre dans les projets de développement mais également d’éducation au développement et dans les plaidoyers.
Il est nécessaire de s’assurer que les rôles sociaux, les besoins et la participation des femmes et des hommes sont pris en compte dans toutes les étapes d’un projet ou d’un programme et dans tous les domaines : social, économique, politique, environnemental et culturel. Et pour ce faire, les ONG disposent d’outils et de grilles d’analyse et de suivi du genre.

Au Sud comme au Nord, l’égalité femmes-hommes est encore loin !

Des inégalités de genre subsistent malgré des améliorations. C’est le constat fait par l’UNRISD (l’Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social) dans un rapport écrit en 2005 « Egalité des sexes. En quête de justice dans un monde d’inégalités  ».

Si l’approche genre permet de prendre en compte les besoins des femmes et des hommes, si elle promeut l’égalité entre les femmes et les hommes que ce soit dans l’accès aux ressources ou aux processus de décision et aux responsabilités, elle nécessite un réel effort de formation à sa mise en place et une véritable prise de conscience des citoyens du Sud et du Nord sur les inégalités de genre.