Au Guatemala, la stupidité et l’ambigüité morale l’emportent à nouveau

, par Sur Américas Press

Cet article de Ilka Oliva Corado a été traduit de l’espagnol au français par Manuela Geneix, traductrice bénévole pour Ritimo. Retrouvez l’article original sur le site de Sur America Press : En Guatemala ganó de nuevo la estupidez y la doble moral.

Ilka Oliva Corado est une écrivain et poète guatémaltèque qui écrit notamment sur la thématique des migrations. Elle exprime ici son ressentit quant aux dernières élections dans son pays.

Des résultats surprenants ? Absolument pas, la façon de penser et d’agir de la classe moyenne guatémaltèque est largement connue. Forte en vanité mais timorée au moment d’agir. A quoi sert le travail de la CICIG, qui démasque les corrompus si, au final, la classe moyenne vient et vote pour cela même qu’elle dit rejeter ? Le problème c’est le manque de Mémoire Historique, l’homophobie, la discrimination sociale, le deux poids deux mesures, le paraître, la négation des Droits de l’Homme aux femmes et la perpétuation du même système patriarcal misogyne.

Veuillez m’excuser si je vous ai froissé mais c’est la plus pure vérité, le résultat des élections au Guatemala n’est ni plus ni moins celui de la stupidité et du deux poids deux mesures d’une classe moyenne servile et d’extrême droite. Sait-elle qu’elle a voté pour plan B du Parti Patriote ? Sait-elle qu’elle a totalement soutenu, une fois de plus, les militaires coupables de tortures, de disparitions forcées, de massacres, d’exils et, naturellement, le Génocide ? Bien sûr qu’elle le sait, elle sait que le moralisateur Jimmy Morales a les militaires derrière lui.

Alors pourquoi tant de manifestations sur les places les samedis de fête de la patrie ? Alors pourquoi faire leur mea culpa si, au final, ils sont venus mourir avec Otto Perez Molina, un autre homme des militaires ? Même si le type n’est pas militaire, il n’en représente pas moins la corruption et l’impunité d’un système ultraconservateur. Quiconque nie le Génocide est aussi coupable, voire plus, que les génocidaires eux-mêmes. Parce qu’il n’y a rien de plus cruel que de cacher par son silence et de nier les faits.

Quel avenir attend le Guatemala avec ces deux candidats au second tour de la présidentielle ? D’un côté Baldizón et de l’autre Jimmy Morales, les deux sont identiques, voter pour l’un ou pour l’autre revient au même ; les deux manient le même plan de travail, les deux misent sur la corruption, l’impunité, le pillage. Que l’un ou l’autre soit élu président, il continuera à faire sombrer encore plus le Guatemala.

Des résultats surprenants ? Absolument pas, la façon de penser et d’agir de la classe moyenne guatémaltèque est largement connue. Forte en vanité mais timorée au moment d’agir. A quoi sert le travail de la CICIG, qui démasque les corrompus si, au final, la classe moyenne vient et vote pour cela même qu’elle dit rejeter ? Le problème c’est le manque de Mémoire Historique, l’homophobie, la discrimination sociale, le deux poids deux mesures, le paraître, la négation des Droits de l’Homme aux femmes et la perpétuation du même système patriarcal misogyne.

Quiconque a une Mémoire Historique sait que Jimmy Morales, en niant le Génocide, ne fera absolument rien en tant que Président pour poursuivre les investigations capables de conduire les auteurs de ce Génocide en prison, lui n’a pas le moindre intérêt à restaurer le tissu social.

Avec Jimmy Morales et avec Manuel Baldizón se poursuivront les mêmes nettoyages sociaux qui exterminent les jeunes des banlieues, la même misère, le même système éducatif, le même système politique, les mêmes mafias. Est-ce que quelque chose changera au Guatemala ? Rien, le pays va continuer à s’enfoncer et cela à cause du vote d’une masse amorphe qui par plaisir a été étudier à l’université, qui a très bien appris le système de classes qui règne dans le pays, adepte du deux poids deux mesures, servile, malhonnête et surtout désinformée. Qui gobe très bien la propagande mais qui est incapable de formuler son propre avis, sa propre analyse. Qui est incapable d’utiliser son cerveau ; les résultats des votes reflètent la médiocrité du pays que nous formons. Des menteurs, des prétentieux sans cœur, sans identité et sans humanité.

Cette classe moyenne est celle qui prétend être « le Peuple » ? C’est pour cela qu’ils se sont approprié le concept ? Pour trahir le véritable peuple en votant pour un ultraconservateur qui nie le Génocide ? Pour que des petites filles continuent à être violées et soient obligées d’accoucher parce que le droit d’avorter n’existe pas ? Pour que n’existe pas au Guatemala le droit au Mariage pour Tous ? Pour que n’existent pas des lois contre les crimes haineux envers la communauté LGBT ?

Jimmy Morales a fait sa renommée en proférant des blagues racistes à l’encontre des Peuples Indigènes et, par son vote, cette classe moyenne est aussi raciste que lui. Cette classe moyenne qui dénonce ceux qui vendent leur vote mais qui est tout aussi vendue et, dans son cas, cela est même pire parce que bien qu’ayant suivi des études supérieures elle est incapable de penser par elle-même. Vendue au Système. Moi je ne dis rien de ceux dont on achète les voix parce qu’ils sont victimes du système, mais, en revanche, je critique les vendus instruits qui sont complices de ce système.

Voici les résultats à ce jour : Jimmy Morales d’abord et Baldizón ensuite. Ils ont ce qu’ils voulaient, pour celui qui meurt par choix, la mort est exquise. L’ennui dans tout cela c’est qu’en embarquant avec eux la classe moyenne déloyale, ils entraînent aussi le vrai peuple, le peuple honnête et marginalisé.
Le système éducatif du pays a très bien fait son travail en collusion avec les universités, en diplômant et diplômant des « professionnels » dépourvus de capacité d’analyse, d’avis personnel et qui, malheureusement, sont d’une extrême stupidité et font du deux poids deux mesures.

Envisageons les résultats du second tour : quel que soit le vainqueur, ce sont 4 années supplémentaires avec la même politique, remaniée et amplifiée, qui attendent le Guatemala. Ne prétendaient-ils pas être la génération du changement ? Ils ne sont qu’une bande de gens ridicules qui trahissent leur patrie, aussi serviles que timorés, homophobes, misogynes et archi-pourris. C’est ça leur printemps guatémaltèque ? C’est ça leur "nous avons marqué l’histoire" ? C’est ça "le Guatemala s’est réveillé." Ce n’est qu’une bande d’analphabètes politiques.

Que le monde sache que c’est la classe moyenne ultraconservatrice qui est la cause de ces résultats aux élections. Et la prochaine fois, même s’ils se jettent à terre en protestant à grands cris durant les manifestations contre la corruption, ne faites pas attention à eux, jetez-leur des seaux d’eau froide pour voir s’ils reviennent à la réalité du pays et cessent de vivre dans leur bulle d’apathie et d’ambigüité morale.

Qui a dit Révolution ?