Deux idées reçues sur le climat

, par Agenda de la Solidarité Internationale

« C’est une triste chose de penser que la nature parle et que le genre humain n’écoute pas. »
Victor Hugo, 1870.

Idée 1 : La COP21 de Paris a permis des avancées significatives pour la lutte contre le changement climatique

L’ « Accord de Paris » a été largement acclamé lors de son adoption le 12 décembre 2015 par la COP21 (21e Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur le changement climatique de 1992). Il a ensuite été ouvert à la signature des Parties (les 195 participants à la COP21, c’est-à-dire la quasi totalité des États de la planète), en avril 2016, à New York.
Pourtant, ce traité ne comporte aucune disposition contraignante (sans quoi le Congrès états-unien aurait bloqué sa ratification) : les Parties n’y prennent qu’un engagement, celui de publier régulièrement des déclarations d’intention sur leurs objectifs dans la lutte contre le changement climatique. Il prévoit des mécanismes de révision mais aucun mécanisme de sanction. Nulle part il n’aborde ni même ne mentionne la question des énergies fossiles alors que, selon le Groupe mondial d’experts travaillant pour les Nations Unies (Giec), limiter le réchauffement à + 1,5 °C d’ici à la fin du siècle par rapport à l’époque dite pré-industrielle supposerait de réduire de 66 à 80 % le recours à ces énergies.
Ainsi, l’Accord de Paris n’ajoute aux décisions antérieures qu’un constat et un seul engagement de pure communication : publier et réviser régulièrement des intentions de réduction d’émissions.
Pour la première fois, la quasi totalité des gouvernements du monde admettent que « notre maison brûle » ; ils reconnaissent l’urgence d’agir et proclament leur intention de le faire. Mais ils renvoient à des réunions ultérieures toute précision sur les actions à mener et fixent des échéances dramatiquement lointaines par rapport à l’urgence qu’ils claironnent (un premier bilan est prévu en 2024 !).
Enfin, l’Accord de Paris aurait dû garantir aux pays les plus vulnérables les moyens de faire face à la crise climatique. Considérant que les pays riches ont une responsabilité historique dans l’évolution du réchauffement climatique, ces derniers ont le devoir d’offrir des garanties financières aux pays pauvres, pour leur permettre de s’adapter. Sur ce point encore, l’Accord de Paris est resté bien trop vague.

Idée 2 : On ne peut plus rien faire, il est déjà trop tard

Il est déjà très tard puisqu’en poursuivant le rythme actuel d’émissions de gaz à effet de serre, le réchauffement climatique est estimé à + 2 °C dès 2030 et + 4,8 °C en 2100. Il ne reste donc que quelques décennies avant que l’accélération du réchauffement n’échappe à tout contrôle.
Il n’est cependant pas « trop tard » : si les États, les acteurs privés et publics et les citoyens se mobilisent à la hauteur des enjeux, notamment en mettant en route la transition énergétique, il est encore possible d’atteindre l’objectif de limitation à + 2 °C pour la fin du siècle.
Comment ? En abandonnant les énergies fossiles, en investissant massivement dans les énergies renouvelables au niveau des transports, des logements, des industries, en obligeant les pays riches à soutenir financièrement les pays pauvres et émergents dans la décarbonisation de leur développement, en favorisant la conversion vers une économie propre à satisfaire les besoins de toute l’humanité sans détruire les bases naturelles de la vie.
Les difficultés principales pour progresser vers une telle transition sont liées au système néolibéral, qui consacre plus d’importance aux égoïsmes nationaux qu’à l’intérêt général de l’humanité, qui laisse de puissants lobbies climaticides (notamment les multinationales) mener les négociations lors des sommets climatiques internationaux et organiser la marche du monde en fonction de leurs intérêts financiers. Enfin, les dirigeants des démocraties sont élus pour de courts mandats alors que les actions nécessaires doivent se penser dans le long terme.
La conscience de la nécessité d’agir est de plus en plus largement partagée par les citoyens de toutes les régions du monde ; il faut en organiser les expressions pour faire pression sur les gouvernants (en particulier dans les pays riches) et pour s’opposer aux intérêts climaticides. Les proclamations de l’Accord de Paris sonnent comme un désaveu mondial des thèses des climatosceptiques ; elles sont un point d’appui pour exiger que l’on passe sans attendre des paroles aux actes. La bataille pour un autre modèle énergétique et pour la justice climatique n’est pas perdue : elle ne fait que commencer.

Que peut-on faire ?

S’informer sur les responsabilités des multinationales face au climat en lisant les articles et enquêtes de l’Observatoire des multinationales :
http://multinationales.org/changement-climatique
Voir aussi :
www.medias-libres.org/2015-greenwashing
www.ritimo.org/Climat-choisir-ou-subir-la-transition
https://france.attac.org/nos-publications/livres

Participer à des campagnes pour réclamer le désinvestissement des énergies fossiles, pour bloquer des projets polluants, pour interpeller les décideurs...
http://gofossilfree.org/fr
http://350.org/climate-crimes-fr
www.amisdelaterre.org/-Climat-.html