Deux idées reçues sur la Non-violence

, par Agenda de la Solidarité Internationale

« En tant que principe philosophique, la non-violence est une requête de sens, en tant que méthode d’action, elle est une recherche d’efficacité. »
Jean-Marie Muller, philosophe français

Action non violente
Défilé des militaires "Bandes de paix" à Bogota, Colombie, 2010. Lucho Molina cc-by-nc

« Certains peuples ont toujours été violents et continueront de l’être »

L’idée que les habitants de certaines régions du monde soient naturellement enclins à agir par la violence est largement répandue. Ces stigmatisations ont attisé une haine et des peurs envers certains peuples entravant l’échange culturel. La Corse, région française dont une frange de la population prône le désir d’autonomie et où le taux d’homicides est le plus élevé, est un parfait d’exemple de territoire où la violence est considérée comme « culturellement enracinée ». Cette image mentale est aussi bien véhiculée par la population extérieure que par les plus hauts responsables politiques.

Les Colombiens sont également présentés comme un peuple violent, les médias n’abordant la Colombie que par le prisme du climat d’agressivité qui y règne, entraînant l’association de la violence à ses habitants.
En Colombie, les assassinats, les kidnappings et les autres cas de violence ne sont pas liés à la culture colombienne, ni aux mœurs des habitants. Ils sont l’aspect visible d’un conflit politique et économique qui ravage ce pays depuis le 19e siècle, en opposant les pouvoirs en place à plusieurs groupes de guérilleros et aux paramilitaires, eux-mêmes liés aux cartels de la drogue.

En Corse comme en Colombie, même si ces populations vivent des situations très différentes le climat violent est lié au contexte économique et politique. Ces clichés sur les peuples violents peuvent cacher une réalité paradoxale. En effet, la Corse a une histoire non-violente, de par son attachement à ses traditions et sa culture, qui amènent aujourd’hui ses habitants à mettre en place des projets non-violents ainsi qu’à considérer l’importance du respect de la terre et de la nature.

« Les non-violents fuient les conflits »

Un cliché commun veut que la violence soit inévitable dans un conflit et qu’elle soit inhérente à la manière d’agir de l’Homme face à l’autre, perçu comme un danger. La violence est une réaction immédiate face à une mésentente et souvent, elle entraîne des réactions négatives : problèmes de santé, troubles psychologiques, isolement social, fuite par des addictions, problèmes comportementaux, absentéisme ou baisse de productivité au travail, etc.

La non-violence est une posture face au conflit : elle n’est pas une forme de passivité mais au contraire un mode d’action. En situation de conflit interpersonnel, agir par la non-violence, c’est vouloir être plus efficace en cherchant une solution dans le respect de l’autre. Tout en expliquant clairement ses objectifs, l’acteur non violent emploie la bienveillance, l’écoute empathique, la lucidité. Ce respect permet de régler durablement le conflit puisque la source des divergences peut être exprimée à travers la parole. Le recours à la non-violence opère un renversement des rôles : ceux qui utilisent la violence se retrouvent en position de devoir justifier leur propre violence devant l’opinion publique qui demande des comptes.

En situation de conflit collectif, la non-violence est souvent employée comme stratégie politique pour combattre les injustices. Les exemples de victoires historiques de la non-violence sont nombreux : renversement de dictatures en Colombie (1957), en Bolivie (1979), aux Philippines (1986), en Ukraine (2004), en Tunisie et en Égypte (2011) ; accès à l’indépendance de l’Inde (1948) par l’action de Gandhi, du Congo (1960) avec Lumumba, du Ghana (1960) avec Nkrumah… ; mouvement des droits civiques aux États-Unis avec Luther King, mouvement pour la réforme agraire en Inde, etc. La non-violence a su montrer sa capacité à mettre en route des changements de société durables, pour plus de justice sociale et de libertés.
La non-violence dans la régulation d’un conflit est donc une double force, qui résiste et construit en même temps.

Que peut-on faire ?

  • Mieux comprendre le concept de non-violence et mieux gérer les conflits par la non-violence par des formations telles que celles d’Initiatives & Changements ou l’Institut de Formation du MAN
    www.fr.iofc.org
    www.ifman.fr
  • S’informer sur les projets alternatifs et non-violents avec la revue Silence
    www.revuesilence.net
  • S’informer des dernières recherches scientifiques sur la non-violence sur le site de l’Institut de recherche sur la résolution non violente des conflits
    www.irnc.org