Défis aux frontères de la Tunisie

, par Groupe antiraciste d’accompagnement et de défense des étrangers et migrants (GADEM), La Cimade

Mission conjointe de la Cimade et du Groupe antiraciste d’accompagnement et de défense des étrangers et migrants, menée en Tunisie du 27 avril au 6 mai 2011.

Introduction

Depuis le début de l’insurrection libyenne, près de 780.000 personnes ont fui les
violences en Libye pour se réfugier dans les pays voisins1. La Tunisie, en pleine transition démocratique, a ouvert ses frontières et a accueilli à elle seule plus de 380.000 personnes jusqu’au 12 mai, et les chiffres de ces arrivées ne cessent d’augmenter.

Plus de 90.000 personnes ont pu être rapatriées vers leur pays d’origine par la cellule d’évacuation mise en place par l’Organisation internationale des migrations (OIM) et le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), des milliers d’autres directement par leurs gouvernements. Mais les arrivées se poursuivent et concernent aussi depuis plusieurs semaines des dizaines de milliers de Libyens, dont un grand nombre de familles. Au plus fort de la crise, la Tunisie a accueilli jusqu’à 15 000 réfugiés par jour. Les frontières restent ouvertes et la population tunisienne fait preuve d’une fantastique solidarité, unanimement félicitée par les acteurs humanitaires présents sur le terrain. Parallèlement, les Etats membres de l’Union européenne n’ont accueilli, entre l’Italie et Malte, que 1,5% des exilés de Libye.

Par ailleurs, les Etats européens, qui ont tout d’abord félicité l’avènement d’un régime démocratique en Tunisie, s’indignent depuis plusieurs semaines d’une soi-disant invasion avec l’arrivée sur la petite île italienne de Lampedusa d’environ 25 000 Tunisiens depuis le début de l’année.

Les déclarations des responsables européens sur la nécessité de trouver des solutions se sont succédées, mais celles-ci semblent se résumer uniquement à une collaboration tunisienne pour empêcher de nouveaux départs et pour réadmettre les tunisiens déjà arrivés en Europe.

Des propos décalés, d’une indécence effarante face à la crise humanitaire à laquelle est confrontée la Tunisie à sa frontière libyenne et aux défis de la révolution.

Alors que de plus en plus de personnes fuient les combats en Libye, l’Europe devrait déjà avoir mis en place des dispositifs de protection spécifiques pour les personnes ayant besoin de protection internationale. Or, le seul souci des dirigeants européens est de limiter les arrivées sur le territoire européen, même si ces mesures portent atteinte aux principes internationaux de la protection des réfugiés, à l’obligation morale de solidarité et risquent de mettre en péril la construction de la démocratie en Tunisie.

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