Nouvelle-Calédonie-Kanaky : Un processus de décolonisation en panne

Chronologie de la Nouvelle-Calédonie

, par CDTM 34

1200 avant J.C. : Des populations venues par vagues successives du Sud-Est asiatique s’installent dans les îles du Pacifique.

1774 : James Cook découvre l’île de la Grande Terre habitée par une population mélanésienne, les Kanak, et lui donne le nom de Nouvelle-Calédonie.

1853 : La France prend possession de la Nouvelle-Calédonie qui devient une colonie française.

Une colonie de peuplement

Période marquée par les confiscations des terres, par une succession de révoltes kanak et de violentes répressions.

1863 : Mise en place du statut de l’indigénat.
Installation du bagne où sont déportés des prisonniers de droit commun et des opposants politiques, notamment des communards.

1878 : Révolte du chef Ataï violemment réprimée.

1887 : Le recensement comptabilise 45 000 Kanak.

1876-1900 : Les Kanak sont cantonnés dans des « réserves » ; les massacres, les maladies, l’alcoolisme déciment la population kanak.

1895 : Fermeture du bagne.

1915 : Départ du premier contingent de 700 soldats kanak pour la Première Guerre mondiale.

1917 : Écrasement d’une deuxième grande révolte kanak dirigée par le chef Noël.

1931 : Exposition coloniale à Paris : un groupe de Kanak y est exposé au jardin d’acclimatation du Bois de Boulogne, à Paris.

1942-1945 : Occupation par l’armée étatsunienne.

1946 : La Nouvelle-Calédonie devient un Territoire d’Outre-mer (TOM).
Fin du code de l’indigénat. Les Kanak ont le droit de circuler librement.

1951 : Création de l’Union calédonienne réclamant une place pour les Kanak dans les institutions mais ne proposant aucune modification au statut colonial.
Les Kanak obtiennent par étapes les droits civiques.

1956 : Dans le cadre des grands travaux (barrages de Yaté et de Dumbéa), on fait venir de la main-d’œuvre de Wallis-et-Futuna.

1956 : La loi-cadre de Gaston Deferre confère l’autonomie au territoire.

1958 : L’Assemblée territoriale de Nouvelle-Calédonie opte pour le statut de Territoire d’Outre-mer (TOM), une autonomie « associant les deux communautés » de la Nouvelle-Calédonie, au moment où les colonies françaises d’Afrique vont accéder à l’indépendance.

1961 : Premier bachelier kanak.

1963 : Une nouvelle et importante vague de colons vient répondre aux besoins de l’économie et à l’exploitation du nickel. Les Kanak ne sont plus majoritaires dans la population et, par conséquent, perdent la majorité électorale.

De la revendication d’autonomie à celle d’indépendance

1970 : Création de l’Union multiraciale qui deviendra plus tard le Front uni de libération kanak (FULK), premier parti créé par les Kanak.

1975 : Festival Mélanésia 2000, premier festival des arts mélanésiens, à Nouméa.

1976 : Création du Parti de libération kanak (Palika), organisation revendiquant la redistribution à la collectivité des terres confisquées.

1977 : Jacques Lafleur crée le Rassemblement pour la Calédonie dans la République (RPCR), parti anti-indépendantiste.

1978 : L’Union calédonienne revendique l’indépendance.

Les statuts se succèdent – Les manifestations pour l’indépendance sont durement réprimées

1983 : La table ronde de Nainville-les-Roches reconnaît aux Kanak un « droit inné et actif à l’indépendance ».

1984 : Constitution du Front de libération kanak et socialiste (FLNKS) ; la charte du FLNKS se donne l’indépendance comme objectif.

1985 : Plan Pisani d’indépendance-association.
Assassinat d’Éloi Machoro et de Marcel Nonnaro, leaders indépendantistes, par les gendarmes français.

1988
avril : Attaque de la gendarmerie de Fayaoué sur l’île d’Ouvéa par des militants kanak, dans le cadre d’une action décidée sur tout le territoire par le FLNKS.
4 gendarmes sont tués. Les Kanak se réfugient avec leurs otages dans une grotte à Gossanah, au nord de l’île. Intervention de l’armée. 19 Kanak et 2 militaires sont tués.

Les accords amènent la paix civile

mai/juin : La « Mission du dialogue » nommée par le gouvernement français aboutit aux accords de Matignon-Oudinot, signés par le FLNKS, le RPCR et l’État français, suivis d’un référendum en métropole instituant une autonomie relative du Territoire. Un référendum d’autodétermination est prévu en 1998.

1989 : Sur l’île d’Ouvéa, assassinat de Jean-Marie Tjibaou et de Yeiwéné Yeiwéné par Djubelly Wéa, indépendantiste kanak radical, originaire d’Ouvéa, lui-même abattu par les gardes du corps.

1990 : Création de l’Union océanienne rassemblant des Wallisien·nes et des Futunien·nes proches du FLNKS.

1995 : Le FLNKS présente un projet de statut pour 1998 instaurant un État libre et souverain. Jacques Lafleur est pour une « émancipation dans l’appartenance à la France ».

1996 : Manifestation organisée par l’Union des syndicats des travailleurs kanak et exploités (USTKE) pour « la défense de l’emploi local » (5 000 personnes).

1998 : Signature de l’accord de Nouméa par le FLNKS, le RPCR et l’État français.
L’accord repousse la tenue du référendum d’autodétermination entre 2014 et 2018. La Nouvelle-Calédonie obtient un statut de large autonomie et le transfert de certaines compétences.
Le Congrès réuni à Versailles approuve la révision constitutionnelle rendue nécessaire par l’accord de Nouméa. Par référendum, les Calédonien·nes approuvent à 72 % l’accord de Nouméa.
Inauguration du centre culturel Tjibaou à Nouméa.

1999 : Premières élections d’un Congrès autonome en Nouvelle-Calédonie. Le RPCR obtient la majorité relative avec 24 sièges sur 54.

Conflits sociaux et économiques sur fond d’enjeux politiques et d’incertitude sur l’avenir institutionnel

2014 : Élections provinciales : les anti-indépendantistes conservent une courte majorité au Congrès.

2016 : avril : Le Premier ministre de la France, en visite en Nouvelle-Calédonie, encourage les Calédonien·nes à rechercher un consensus en vue du référendum.
Face à l’effondrement des cours du nickel, l’État annonce la mise en place d’un plan de soutien financier à la filière nickel en Nouvelle-Calédonie.

2017 novembre : le Comité des signataires s’entend sur la liste électorale pour le/les référendum/s sur l’accession à la pleine souveraineté.

2018
mars : L’État et les partis signataires de l’accord de Nouméa décident de la question qui sera posée par référendum : « Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ? »
Mai : Visite d’Emmanuel Macron en Nouvelle-Calédonie. Il se rend à Ouvéa et remet au gouvernement du territoire l’acte officiel de prise de possession du 24 septembre 1853. Il prononce un discours sans prendre parti sur la question qui sera posée par référendum mais souligne les atouts du maintien des liens avec la France.

Forte participation aux deux premiers référendums : le OUI progresse, le NON l’emporte

4 novembre : 1er référendum – Participation 81,01 % - Oui : 43,33 %

2019 mai : Élections provinciales : courte majorité pour les anti-indépendantistes. Roch Wamytan, de l’Union calédonienne membre du FLNKS, est élu président du Congrès grâce aux votes des élus de l’« Éveil océanien » (Wallisien·nes et Futunien·nes ).
Crise politique : les membres du gouvernement élu·es par le Congrès n’arrivent pas à élire un président.

2020 : Initialement programmé le 6 septembre, le 2ème référendum est décalé au mois d’octobre en raison de la crise sanitaire due au coronavirus.
Juin : Les indépendantistes protestent contre la diffusion par le gouvernement d’un document détaillant les conséquences d’un vote pour ou contre l’indépendance.
4 octobre : 2ème référendum : participation 85,69 % - Oui : 46,74 % ; La participation et le « oui » à l’indépendance sont en augmentation.

2021
juillet : Louis Mapou, du Palika membre du FLNKS, est élu président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie.

3ème référendum : forte abstention des indépendantistes, le NON l’emporte

12 décembre : 3ème référendum – Participation : 41,87 % - Oui : 3,50 % : Consultation boycottée par les indépendantistes qui avaient demandé son report en raison de la crise sanitaire.

2022
juin : Le FLNKS demande au Comité spécial de la décolonisation des Nations unies d’examiner la question de la légitimité du 3ème référendum.
Août : Mort de Dewé Gorodey, figure littéraire et indépendantiste kanak.
Octobre : Les indépendantistes contestent la tenue du 3ème référendum et refusent de participer aux réunions trilatérales sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie.

2023
juillet : Dans le cadre d’un déplacement en Océanie, Emmanuel Macron et le ministre de l’Intérieur font escale en Nouvelle-Calédonie. Dans un discours aux Calédonien·nes, le chef de l’État déclare que « la Nouvelle-Calédonie (qui) est française car elle a choisi de rester française » doit écrire un nouveau projet sur le statut du territoire toujours promis à l’autodétermination, dans un dialogue avec l’État, statut qui fera l’objet d’une révision de la Constitution, en 2024.
30 août : Rock Wamytan est réélu président du Congrès.

Début des négociations tripartites sur l’avenir de l’archipel

6 septembre : Réunion à Paris avec des délégations indépendantistes et non-indépendantistes et des représentant·es de l’État. Un document « confidentiel » de l’État est remis aux délégations, concernant l’avenir constitutionnel pour la construction d’une citoyenneté calédonienne et un « nouveau statut de l’archipel ». La Première ministre annonce l’ouverture d’un cycle de négociations et une visite en Nouvelle-Calédonie du ministre de l’Intérieur et du ministre délégué chargé des Outre-mer, en octobre.
24 septembre : Candidate aux élections sénatoriales, Sonia Backès, présidente de la province Sud, et cheffe de file des loyalistes est largement battue par Robert Xowie, du FLNKS. Elle démissionne de son poste de secrétaire d’État à la citoyenneté.
2 octobre : Glencore actionnaire et financeur de Koniambo Nickel (KNS) menace de ne plus financer, dès mars 2024, l’usine de Koniambo détenue par la province Nord.
16 octobre : Les membres du Congrès adoptent une redevance sur les extractions minières et une taxe sur les exportations de minerai.
21 octobre : Discussions sur les évolutions statutaires des Outre-mer à l’Élysée. Le dossier de la Nouvelle-Calédonie est toujours jugé comme prioritaire mais les déplacements du ministre de l’Intérieur et du ministre de l’Économie sont reportés à fin novembre.
L’Union calédonienne qualifie d’irrecevable le projet proposé par le gouvernement, notamment concernant le dégel du corps électoral qui viendrait « mettre fin aux équilibres politiques trouvés par l’accord de Nouméa », et suspend toutes les discussions avec l’État.