Abstention, déficit démocratique et légitimité des pouvoirs

Par Moustapha Kassé

, par Pambazuka

Le phénomène de l’abstention est, aujourd’hui, une caractéristique de toutes les démocraties qu’elles soient jeunes ou adultes. La désillusion politique atteint de plus en plus de citoyens qui souvent se demandent, avec angoisse ou du moins une certaine gêne, à la veille d’une élection, pour qui voter. Ce désintérêt croissant de la population envers la politique menace-t-elle véritablement le système démocratique ou plutôt anéantit-il la légitimation des pouvoirs ?

Selon Anne Muxel (L’abstention : déficit démocratique), l’abstention progresse quel que soit le type d’élection, dans nombre de pays européens et africains. Comme un baromètre, l’abstention est un indicateur du climat de l’opinion, du lien entre les citoyens et leur représentation politique, et plus largement de l’état de santé du système démocratique. Un autre auteur comme Mark N. Franklin, examinant l’évolution de la participation électorale dans vingt-deux pays sur une longue période – de 1945 à nos jours –, constate qu’elle a augmenté en moyenne de 5,5 points.

La problématique est quasi récurrente dans tous les pays et pour la majorité des élections, en dehors des présidentielles, pour lesquelles la mobilisation électorale est souvent très forte et peut varier de 70 à 80%. Toutes les autres élections, sans exception, accusent des taux élevés d’abstention. En prenant le cas de la France, aux régionales de 2004, l’abstention était de 38% au premier tour, aux municipales de 2008, elle était de 35% et en 2010 le taux était encore plus élevé. Il est souvent souligné qu’en 2002, le candidat du Parti socialiste a été éliminé au premier tour à cause d’une abstention massive. Les élections législatives dernières, en France comme au Sénégal, n’ont point dérogé à ces constats. Pour mémoire, au Sénégal, aux élections législatives de 2007, le taux d’abstention avait frisé les 70%, même si l’opposition avait boycotté les urnes.

Le débat mené actuellement sur l’abstentionnisme est très mal engagé : les considérations politiciennes et ultra partisanes l’emportent sur des réflexions robustes, animées par des chercheurs spécialisés (sociologues, politologues, statisticiens et économistes) qui s’appuient sur des faits quantitatifs et qualitatifs avérés. Le phénomène étant à la fois permanent et massif, il mérite une réflexion profonde pour en savoir le niveau, les causes, les relations avec le déficit démocratique et la légitimité des pouvoirs et enfin les solutions. Cet article est une simple introduction au débat et se propose de lancer quelques pistes autour de deux questions centrales : Quelles sont les causes profondes de l’abstention ? Que faire pour améliorer son niveau ?

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